jeudi 26 janvier 2012

Excusez-là.

Aujourd'hui,

Je m'adresse à ceux et celles qui inventent, qui ont un cerveau de génie, qui investissent, et qui ont au coeur une générosité qui pourrait être étiquetés avec le terme 'le-coeur-sur-la-main'.

Est-ce que quelqu'un d'entre vous pourrait:

1- inventer un truc pour qu'on arrête de s'appauvrir à vouloir gagner sa vie honorablement, sans voler personne, et en faisant un travail qui mette en valeur nos compétences.
2- se rendre au Danemark et parler aux autorités qui donnent le feu vert aux massacres de dauphins qui meurrent par milliers chaque année, et leur expliquer qu'aucune fête traditionnelle pour jeunes garçons qui sert de passage à l'âge adulte ne peut motiver des gestes aussi cruels, et horribles, et que ces dauphins, d'une intelligence nettement supérieure à ces barbares, souffrent le martyre, pendant des jours, pour simplement assouvir une pratique qui devrait être sanctionnée et bannie pour toujours.
3- inventer un travail qui permette aux artistes qui ont des périodes difficiles, afin que le loyer, la bouffe, et les nécéssités soient couverts, pour pouvoir vivre un tantinet plus sur le seuil de la pauvreté que sous.
4- trouver une façon qui permette, dans notre merveilleuse législation québécoise, d'embaucher des médecins, dont les origines seront diverses, et dont les compétences seront reconnues et célébrées.
5- rendre les soins de santé accessibles pour tous, et considérer les cas urgents en leur donnant priorité, en s'assurant que ces services ne soient pas toujours offerts contre une compensation monétaire. De toute façon, les mieux nantis sont moins malades, et devraient laisser la place aux autres qui ne mangent pas à leur faim, n'ont pas de vêtements chauds pour l'hiver, pas d'argent pour payer leurs médicaments, et qui n'ont pas de voitures pour se chauffer le popotin entre deux courses.
6- changer les règles d'embauche pour qu'on puisse offrir à ceux et celles qui ont à coeur l'éducation des jeunes de pouvoir enseigner, de pouvoir partager leur savoir et leur expérience, sans que ceux-ci soient contraints de retourner aux études parce que leur baccalauréat est 'passé date'.
7- inventer une clause pour que ceux et celles qui gangnent plus que ce qu'ils ont besoin soient obligés de le partager avec les autres.
8- mettre sur pied une forme d'enquête mondiale sur les dépenses superflues, qu'on sactionne tout le monde, et que ceux à qui il manque tout pour vivre puissent vivre autrement qu'en quêtant.
9- que les parents qui demeurent à la maison pour élever leurs enfants, et les aidants naturels qui soignent à temps plein leurs proches, puissent recevoir des palliers de gouvernement une compensation monétaire pour leur contribution remplie d'amour aux premières années de la vie d'un autre être humain, ou aux derniers moments de celui-ci.
10- créer une commission sur le bonheur, découvrir comment on peut en produire plus, quels en sont les ingrédients essentiels, et les distribuer gratuitement, sans égard à la situation financière, l'origine, l'apparence physique et les capacités intellectuelles de chacun.

Inventeurs, à vos crayons. 

Excusez-là.
10-

jeudi 19 janvier 2012

Le pouvoir des mots

Sur Facebook, le 31 Décembre dernier, une vedette m'a écrit un message personnel. 

Un mot que je lui avais envoyé il y a belle lurette l'avait touchée et, réalisant qu'en cette fin d'année elle n'y avait jamais donné suite, elle le fit le 31 Décembre dernier.  Il me semble que les vedettes ont autre chose à faire, surtout en fin d'année, comme ça.  Elle, elle l'a fait.  Des paroles remplies de gentillesse et de sensibilité, dans un message qui m'a touchée, à mon tour. Un retour d'ascenseur en mode fast-forward.

Je n'avais pas d'attentes, et avais simplement envoyé un mot parce que ses propos, lors d'une émission où elle fut invitée, m'ont vraiment touché en plein coeur, mais sans plus.  Pas de 'écris-moi si t'as le temps', ou même d'allusions subtiles du genre 'je te sais probablement trop occupée pour me répondre'.  Rien,  juste un merci à la fin pour ses propos tenus, c'est tout.

Reste que je n'en revenais tout simplement pas. 

J'avoue, depuis quelques années, je trouve toujours les fins d'années pénibles.  D'abord, parce que je n'ai personne avec qui 'changer d'année', comme par exemple un tchum amoureux qui me frencherait ça d'aplomb, ou encore avec des amis, ou des membres de ma famille, qui sait.  Mais tout le monde, le monde entier a autre chose à faire que d'inviter Claire à défoncer la Nouvelle Année.

Mes soeurs ont leurs vies, leurs familles respectives, avec leurs horaires bien remplis.  Mes parents se couchent tôt (ils sont sages, eux!), et ne regardent pas le bye bye.  Mes neveux et nièces ont leurs vies bien chargées aussi.  Mes oncles et tantes ont leurs familles, aussi.  Mes cousins et cousines aussi.  Mes amis sont soit 'matchés', ou ont une famille à eux et en ont plein les bras. 

Je visite la mienne, pendant les Fêtes.  Je loge chez mes parents pendant mes courts séjours.  (Et même si je restais chez-moi, je serais seule quand même de profession, pour celles et ceux qui pourraient être tentés de rétorquer que je n'avais qu'à rester à Montréal. De plus, nous avons une grosse réunion de famille le 1er au matin, et comme je n'ai pas de voiture, j'arrive la veille.) 

Mais chaque année, je me dis toujours que je ne veux plus passer la veille du jour de l'an seule, en pyjamas devant la télé de mes parents à minuit.  C'est terrible, en tous cas ce l'est pour moi, ça me brise le coeur en centaines de milliers de miettes.  Je n'ai pas le courage d'aller affronter la fin de l'année dans un bar.  Oui, je pourrais rencontrer des gens fort sympathiques, et|ou je pourrais aussi m'y retrouver encore plus tu-seule.
 
Mais chaque fois, je me dis que je ne veux plus rire toute seule des bonnes blagues d'Infoman, du Bye Bye.  Que je ne veux plus être seule à me souhaiter une bonne année, à penser à tout le monde que j'aime, et pleurer jusqu'à épuisement pour ensuite aller me coucher.  Quand minuit arrive, c'est terrible, comme la solitude est magnifiée, comme elle prend toute, toute la place. 
 
Parce que, la solitude, le reste de l'année, ça va toujours dans le quotidien, mais certaines périodes de l'année sont plus difficiles que d'autres, j'avoue. Le temps des Fêtes, la Saint-Valentin, ma fête... plus difficile à avaler, le motton.  Par exemple, quand c'est ta fête et que tu n'as personne avec qui partager ta vie, faut que tu mettes une invitation toi-même sur facebook, si tu veux voir du monde.  C'est pour dire.  C'Est le lot des célibataires.  

Avez-vous remarqué à quel point tout, en société, est fait et conçu pour les couples, et la famille?  Eh oui.  Un exemple, les restos:  Vous arrivez seul(e), oh que vous allez vous faire regarder. 

Pas surprenant d'entendre que le taux de suicide grimpe un peu pendant les Fêtes.  Je le répète.  C'est terrible, quand on est seul(e)s.  Certains d'entre vous pourriez me dire, 'Mais Claire, voyons, arrête de te plaindre, tes parents sont encore en vie, t'es pas toute seule! Pis t'as tes soeurs, aussi! AYE, réveille!!' Si vous avez eu cette réaction, je vous invite poliment à retourner en arrière et relire depuis le début.

- En plus, pour gagner ma croûte, à travers le reste artistique, je fais des sondages.  Parfois, je vous dis, mon coeur devient tellement gros... Il ont des familles, des maisons, des enfants qu'on entend rire en fond sonore.  Ils ont des conjoints, des blondes, certains ont rénové leurs maisons pour y accueillir les grands-parents, et n'ont même pas 35 ans.  Coudonc, j'ai-tu passé à côté de ma vie? -

Le 31 Décembre dernier, même si j'étais physiquement seule, je ne l'étais pas, intérieurement.

Chère Véro, pour ton gentil message, et tes bons voeux que tu as été la première à offrir, merci beaucoup.  J'ai regardé le Bye bye et me disais, quand même, ce qu'elle est chouette, cette fille.  J'entends qu'elle en énerve plusieurs, parce qu'on a de la difficulté à lui trouver des failles, des travers qui pourraient ENFIN nous la faire haïr pour une raison précise.  Continuez à chercher, sans moi.  Je ne dis pas que Véro est parfaite, je dis simplement que j'ai eu l'occasion de constater sa gentillesse, et sa générosité, d'une façon plus personnelle.  Je dois dire aussi, pour avoir travaillé sur 3 fois rien, que Louis Morrissette est tout aussi empreint de gentillesse et de générosité. 

Désolée pour ceux qui n'y croient pas.  C'est comme ça.  Ces deux-là, c'est de l'or en barre.

Un petit message, quelques mots qui font toute une différence, et la solitude devient vivable.  J'ai versé des larmes, à minuit, qund même, celà dit.  Mais dans le lot, certaines étaient provoquées par la gratitude de ce moment.  Et oui, j'ai ri des blagues du Bye Bye, pour vrai.

Le lendemain, mes yeux étaient bouffis, encore et toujours, à la différence que je me sentais importante aux yeuxde quelqu'un, qui avait pris du temps pour m'écrire.

Incroyable, Véro, comment il ne faut jamais sous-estimer le pouvoir des mots.

mardi 17 janvier 2012

Pour vrai.

Aujourd'hui, j'ai retrouvé Guylaine et François. 

Juste écrire leurs noms dans mon agenda me rendait fébrile.  Après tout, il y avait belle lurette que je n'avais pas recroisé l'itinéraire de vie de ces deux-là avec qui j'ai tant ri par le passé.  Plus de 23 ans au moins, selon nos calculs.
L'amorce qui s'est faite via facebook par mon neveu (Guylaine lui a déjà enseigné) était déjà sympathique.  Hier, le coup de téléphone pour confirmer le rendez-vous.  Le ton de voix était le même:  Enjoué, heureux, facile d'approche et d'une simplicité qui fait chaud au coeur.
Un peu comme si nos vies n'avaient jamais été séparées par la vie et ses multi-choix de routes.
François dût nous quitter vers 13h00, mais Guylaine et moi avons jasé pendant des heures sans arrêt.  Quelle re-visite de souvenirs, c'en était presqu'étourdissant par moments.  Mais ce qui demeure fascinant, c'est comment, après tant d'années, nos esprits se rencontrent, se retrouvent, et reprennent là où ils avaient laissé, on dirait.
Il y a dans ces rencontres une zone de confort, un peu comme retrouver ses espadrilles préférés, qui ont suivi le cours des pas en se pliant aux exigences de nos arches de pied, de nos talons, de nos orteils.  Aujourd'hui, c'était cette impression que je reçus de Guylaine et de François: Nous avons déballé nos zones de comfort et d'incomfort ensemble, sans jugement, à la mi-temps de nos vies.

Ce soir, j'ai une pensée pour mes grands-parents qui, de leur vivant, me racontaient avoir revu untel ou unetelle, et combien ils s'étaient rappellés de bons souvenirs, les yeux brillants.  Mes parents, toujours vivants, rayonnent en retrouvant des amis d'antan, mais en ont aussi ajouté des nouveaux, car la grande faucheuse de vie leur en a pris une grosse batch, ces dernières années, dont leurs meilleurs amis.


Trop souvent, dans mon métier, je vis des moments vraiment incroyables avec des équipes de tournage, moments qui donnent lieu à des heures, parfois des semaines ou des mois de travail aux horaires compressés et intenses.  On apprend vite à se connaître, à s'entendre, à s'apprécier mutuellement.  Combien de fois m'a-t-on dit après un tournage:  'Toi, là, j'te trouve tellement trippante! Il faut qu'on se revoie!' En fait, beaucoup de symbioses ont lieu pendant ce travail fiévreux où tout se joue sous la pression de ne pas péter le budget de la production.  En jargon plus normal, ça veut dire qu'on passe des heures à régler des détails techniques divers (son, éclairage, et les 'défis' comme les animaux, la circulation automobile, la température, les petits enfants et les bébés, les caméras, le feu, le vent, et instruments spécialisés nécessitant une surveillance particulière commeles explosifs, les machines à fumée, etc), et pendant que les acteurs attendent pendant des heures et des heures que tout soit réglé, on jase, on échange des propos... on apprend à se connaître. Et puis, quand, après avoir attendu près de 12 heures pour faire notre scène, on nous dit que c'est finalement notre tour, notre esprit a eu l'occasion de décrocher du personnage plusieurs centaires de fois.  Et là, il faut s'y mettre.  Toute l'équipe est épuisée, les producteurs regardent leur montre, les acteurs leur texte, et on se croise tous les doigts pour que tout se passe bien.  Pression, pression.  Les acteurs n'ont pas droit à l'erreur, sauf s'ils travaillent avec des équipes de réalisations qui comprennent que nous sommes, nous aussi, des êtres humains.  

Ce temps qui file, cette urgence de s'apprivoiser, toute cette frénésie tisse des liens.  À 40% éphémères, selon mon expérience.  Les autres 60% feront avec vous un doux effort conjugué pour vous retracer, et provoquer un rendez-vous sympa. Avec certains, de ce lien bien vivant émergera une belle amitié, et j'ai ce privilège d'en avoir tissé conjointement dans le métier, l'une d'entre elles depuis 1985.  Avec d'autres, il s'agira d'une ou deux rencontres par an, très belles, aussi, où l'on reprend la conversation là où elle avait été laissée, la dernière fois.  Mais beaucoup ne seront que de courte durée.  Pas par manque de volonté, jamais. 

Dans une semaine, il m'est déjà arrivé, dans mes fastes années, de changer de projets, de groupes de travail 4, et même 5 fois!  À chaque fois il faut apprendre à connaître les gens, tenter d'y trouver un terrain commun confortable, s'habituer à de nouvelles énergies, des façons de faire différentes, dans des endroits différents à jouer, pour raconter chaque fois une histoire différente, avec des médiums de travail différents (télé, cinéma, théâtre, répétitions ou enregistrements, etc.).  Il faut donc, pour bien performer, avoir un minimum de contrôle sur la timidité de travailler avec des étrangers (oui, je suis timide, comme bien d'autres acteurs... non, ça paraît pas.  On en fait un métier, que ça ne parraîsse pas), et se rappeller des mille et une indications données par le réalisateur, son assistant, quand ce n'est pas la costumière (assis-toi pas, j'viens de repasser ton linge!), la perruquière (je l'sais que c'est chaud en-dessus, mais c'est comme ça) ou l'équipe de maquillage (faut la r'maquiller, a saigne du nez!).  Je blague.  Ces gens-là sont extraordinaires et travaillent la plupart du temps dans des conditions horribles.  Je les salue bien bas.

Il m'arrive bien souvent de tisser de beaux liens de tournage avec l'équipe technique.  Ces personnes passionnées, sont souvent oubliées.  Je les salue.  Particulièrement les gars.  Pourquoi êtes-vous tous si grrrrr... beaux comme des coeurs?

François et Guylaine, et Josée, font partie de ma jeunesse, de cette période de ma vie où les amitiés y vivaient à grands coups d'accords de guitare, et se bâtissaient, au fil du temps, sans effort.  Les deux ont vécu leurs lots d'épreuves, en ont mangé des solides, tout comme moi.  Les entendre a été en quelque sorte un baume, parce qu'ils s'en ont sortis de façon glorieuse. 

Mais ultimement, leur discours m'a fait réfléchir.  D'abord, la VIE est 'une précarité, aussi bien la vivre de façon à ce qu'on puisse toujours avoir accès à nos rêves.  Ensuite, que la VIE recelait des trésors de tous les instants. Et ultimement, que notre expérience ici-bas serve à quelque chose.  Comme moi, ils ne sont pas à eux proprement dit, mais ont contribué positivement à la vie d'une multitude d'enfants et d'adolescent(e)s.  Je les salue, et anticipe avec la joie notre prochaine rencontre.

Différentes formes d'amitiés, différentes expériences, différents parcours.  Tous ces morceaux,gros et petits, s'ajoutent à mon expérience de vie; et tout ce que je souhaite, c'est que personne n'aura regretté en faire partie.

2012 a un vent d'amitiés, qui refont surface.  Je souhaitais cette brise depuis des années.  Je retrouve aussi d'anciens collègues de travail sur de nouveaux projets, et oui, quelle phrase absolument kétaine, mais tellement vraie en ce qui me concerne:  EH que le monde est beau.  Je ne fais pas que référence ici à la gang de beaux gars techniciens qui me paument encore, mais à tous ceux et celles qui composent mes moments d'amitiés.  Beaux en-dehors, beaux en-dedans. 

Demain.  Intéressant parcours.  Je rencontre Josée, avec qui j'ai repris contact l'an dernier. Cette jeune fille excellait dans toutes les matières, sans exception.  Oui, les contraires s'attirent. Surtout quand on retrouve après 29 ans de routes séparées.
Nos vies sont à des lieues de différences, encore aujourd'hui, à tous points de vue.  Mais le regard que nous avons est plus périphérique, plus simple, et aplanit nos différences.  J'admirais les 'bollés', dans le temps; maintenant, je les apprécie.

L'amitié, que je croyais pour un temps classée 'espèce en voie de disparition', refait surface dans mon itinéraire de vie.  Be careful what you wish for. Pour vrai.

dimanche 15 janvier 2012

L'autre jour, je fus frappée de plein fouet par le froid, mais j'avais prévu le coup. 
Le conseil le plus efficace jamais reçu en temps froid:  Au lieu d'une seule grosse pelure (exemple, un ggrrooos chandail de laine sous votre manteau d'hiver), il est recommandé d'en mettre plusieurs, plus minces.  Le corps doit traverser toutes ces couches pour sortir son air chaud à l'extérieur, et ça prend du temps, traverser tout ça.  Et pendant qu'il traverse, il y a humidification.  Plusieurs couches ne risquent pas d'être mouillées autant qu'un gros chandail dans laquelle vous avez sué à grosses gouttes.  Autrement dit, vous gardez la température de votre corps beaucoup plus facilement.
J'en fis la preuve.  Deux couches moyennes de vêtements d'automne au lieu d'un gros, énorme chandail qui pourrait donner suffisamment de chaleur à trois personnes, un enfant, et un 'tit chien.  Et ce fût très, très confortable. Je le recommande fortement.  Et, à -18C (facteur vent -23C), je fus confortable.  J'ai juste besoin d'une cagoule pour protéger ma face de pleine lune.
Frappée aussi par la beauté du paysage... tellement blanc. 
Du blanc, plus blanc que blanc, et du bleu, tellement bleu, Une vraie carte postale, comme dit souvent mon père.
Rien de plus beau qu'une neige fraîchement tombée. Pas celle qui est croûteuse, celle qui est légère, comme ce matin, et c'est normal:  Elle ne sait pas encore où elle devrait vraiment se déposer, elle vient d'arriver, quand même.  Donnons-lui le temps de s'installer.
Tous les jours, je traverse un parc absolument mignon, qui fait très 'chalet' avec petits sentiers dans le bois, gonflés de grands arbres, de petits bosquets, de sapins et de pins.  Nous y avons même l'odeur du feu de foyer en prime, le soir. 
Lorsque la neige est 'installée' depuis un bon moment, les indéfectibles marcheurs dont je fais partie doivent traverser ce petit sentier mignon pour se diriger vers le métro, posant leurs pas un à un, et façonnant une petite promenade, un petit chemin, au gré des premiers pas qui y ont laissé des marques.
Ce matin, j'étais la première à y faire des traces.
Instantannément, je retrouvai des souvenirs d'enfance, où, lors de froids semblables, ma mère nous habillait chaudement, et je voulais toujours être celle qui marquerait les pas du petit chemin qu'il faillait retracer avec nos pas après une bonne bordée, pour traverser le champ en face de notre maison, qui nous menait tout près de l'école.
J'ai vite remarqué qu'on suivait mes pas, même si parfois je changeais un peu la route, faisant un petit croche ici, près de l'arbustre avec des 'pics-pics' qui collaient à nos foulards, nos tuques et nos mitaines, ou là-bas, près de la vieille clôture, à côté des Dallaire.
Quand, quelques jours plus tard, je regardais 'ma' route, j'étais tellement fière.  Tout le monde y avait marché, sans exception, martellant la neige, la tapant à l'aide de toutes ces centaines de pas... et je savais que j'étais LA responsable de cette route.  C'Était MA route, et elle servait à tout le monde.
Tout ça m'est revenu d'un coup, ce matin.
Et ce soir, quand je vais revenir, la route sera complètement aplanie, et je n'aurai pas d'efforts à faire pour établir. débuter, amorcer un début de route.   Du vrai travail d'équipe, bénévole, anonyme, qui sert à pleins d'inconnus.  C'est beau, quand même, non?
Ce qui me fascinera toujours, c'est que le tout commence avec des pas, un pas à la fois. Des milliers de pas, imprimés les uns par-dessus les autres, pour un seul et même dess(e)in. Des inconnus qui en aident d'autres, sans demander leur reste.  C'est beau, quand même.
Et du coup, je me suis arrêtée, à mi-chemin, pour respirer.  Une autre image vint me saisir.
Je pense aux victimes des tremblements de terre, des tsunamis, des tornades et autres phénomènes météo.  Je pense à leurs routes qui sont sens-dessus-dessous, avec aucune référence au paysage d'avant.  Plus rien n'est debout.  Le ciel, auparavant entrecoupé d'architectures diversifiées et colorées, prend beaucoup de place, bien au-dessus des décombres, bien au-dessus des camps de fortune.  Plus rien ne ressemble à rien.  Comme un gros château de cartes qui s'est effondré.  Eh qu'on aimerait ça que quelqu'un joue à 'ramasse' avec toute cette merde, aide tout le monde, leur rebâtisse une fierté, une sécurité, une raison de se lever le matin.  Quelques individus le font, à petite échelle.  Des Saint(e)s des temps modernes.  Mais plus rien ne sera comme avant.
Je pense aussi à la peine, au vide que la grande faucheuse met à la place de la personne qu'elle emporte.
Un pas à la fois, après que la grande faucheuse a tout chamboulé nos routes, un pas à la fois pour continuer à avancer, à refaire la route du mieux qu'on peut, sans avoir les guides d'avant pour ce faire. Plus rien ne sera comme avant.
C'est terrible, la souffrance d'avoir perdu un être cher. Ce qui est terrible, aussi, c'est d'entendre des énormités pour banaliser cette souffrance, parce que la plupart d'entre nous, ne nous cachons pas comme des autruches, ne savons pas quoi ... quoi dire, quoi faire, quoi ne pas dire, quoi ne pas faire. La douleur de l'autre nous rend un peu imbéciles, sans mode d'emploi autre que le coeur qui ressent, et qui veut faire quelque chose. 
En ce qui me concerne, j'ai compris que mon mécanisme avait tout simplement peur de faire une gaffe, ou de dire LA chose qu'il ne faut pas dire.  Et plus j'ai peur de faire une gaffe, plus mes chances d'en faire une sont grandes.  Sinon, je m'en tire habituellement bien lorsque je mets toute mon attention à simplement être là, pour la douleur de l'autre.
Quand Andrée, ma deuxième mère, est décédée, ma peine fut plus grandeque je n'aurais pû l'imaginer, et elle l'est encore, presque deux ans plus tard.  Tant de choses me font penser à elle, et me font réaliser à quel point elle me manque, et si souvent. 
Les ésotériques et autres esprits, beaucoup plus raffinés que votre humble servante en rajoutent, avec leurs connaissances en matière d'après-mort en m'avertissant que je dois la laisser partir, parce qu'elle va s'emprisonner, et qu'il faut qu'elle puisse voler en toute liberté. D'autres personnes bien intentionnées et éprises d'honnêteté ('même si c'st pas facile à entendre, c'est important que quelqu'un te le dise') veulent me clore le bec et le coeur avec la classique 'au moins elle ne souffre plus, alors tu n'as plus besoin d'avoir de la peine'. Ben oui, c'est aussi simple que ça, n'est-ce pas?  Comme une lampe qu'on éteint avant d'aller se coucher.  Mais ces champions de la délicatesse, eux, me font la remarque que je pourrais peut-être passer à autre chose, qu'elle est morte et que ce n'est pas en pensant à elle qu'elle va ressusciter!  Be-ra...vo.  Que de réconfort dans ces paroles.  Consolation garantie. Bref.
La peine, la sensation de vide que crée leur absence sont en soi aussi importantes qu'un gros traumatisme, magré qu'on reprenne du service dans le quotidien de nos vies. Mais quand même.  Quand ça fait mal, ça fait toujours mal, au plus profond de nous-mêmes. Avec le temps, on apprend à composer avec ce vide.  On le visite, et il devient un peu moins écho avec le temps.  Mais au début, c'est tellement assourdissant que c'en est étourdissant.  Et tellement, tellement vide.  Rien ne sera jamais plus pareil.
J'accompagne de temps en temps des gens en fin de vie, et leurs familles par ricochet.
Souvent, les mots ne suffisent plus.
À L'Hôpital Sainte-Justine, un petit garçon de 6-7 ans avait demandé à me rencontrer. 
Nous avons eu du plaisir, j'avoue, avec mon immense coton ouaté, d'où il se cachait et sortait, fier propriétaire de cet igloo mou et bleu marine dont lui seul en détenait la clé, ainsi qu'un plan pour trouver un trésor caché, qui finalement était toujours dans son oreiller!  L'imaginaire de cet enfant était magnifique. J'adorais le faire rire à gorge déployée en faisant semblant de descendre dans le sous-sol de sa chambre et d'en remonter.  Je le quittai à regret, disant que j'avais déjà hâte de le revoir.  Cher Ti-Pou!
La deuxième visite fut différente.  Sa mère, habituellement affable et toujours heureuse de voir les visiteurs qui aidaient à son fils à changer le mal de place, avait cet après-midi-là les yeux bien rouges, et avait peine à parler entre ses sanglots étouffés. 
Pas beaucoup de rires en cascades dans la chambre.  Juste des sons de machines, en écho avec une télé au volume bien faible, comme le Ti-Pou en question. 
Ti-Pou était bien mal en point, et on m'a informée qu'il ne lui en restait pas pour bien longtemps.  Une jungle de solutés, passant dans tous les orifices, des tubes, de l'oxygène, des couvertures chaudes (en plein été) et bien d'autres appareils étaient branchés sur le petit, comme si Spiderman avait perdu le contrôle de ses toiles d'araignée et avait voulu retenir Ti-Pou de ne pas partir...
Quand je me suis approchée du lit, Ti-Pou a lâché un grand soupir.  Je vois une larme qui coule sur le côté.  Il ne peut même plus parler, me dit sa mère.
Je lui prends la petite main, à travers les tubes et autres gogosses.  Il pèse maintenant une plume, et même une plume, dans le fond, c'est exagéré. Il est presque transparent, notre Ti-Pou.
Le seul moyen de communication qu'il nous reste sera pour Ti-Pou de faire signe oui ou non: 'oui' étant deux serrements de main, et 'non' un seul.
- Ti-Pou, as-tu le goût que je te lise une histoire de Tintin? Deux serrements de main. Ok.
- Veux-tu que je m'en aille, pour que tu puisses te reposer? Deux vigoureux serrements de main. Ok.
- Aimerais-tu que je te raconte une histoire?  Un gros serrement de main. Ok.
Je lui racontai une courte histoire. 
- Est-ce que l'histoire t'a plu? Gros serrement de main.  Un gros soupir.  Une autre grosse larme qui fait son chemin sur ses petits creux de joues.
- As-tu mal?  Hésitation, puis deux petits serrements de main. 
- Veux-tu fermer tes yeux un p'tit moment, et faire un petite sieste? Deux serrements.
- Écoute, moi j'ai le goût de faire quelque chose avec toi.  Qu'est-ce que tu dirais de ça si on faisait rien, ensemble?  On pourrait juste être ensemble, mais on fait rien. 
Ti-Pou me regarde, et esquisse un sourire. Il veut parler, et baragouinne quelque chose qui fiit par â.
- Ti-Pou, es-tu capable de me 'dire' ce que tu veux?  Deux serrements. Ok.
- Es-tu capabe de me le montrer? Un serrement.
- Ok, montre-moi ce que tu veux.
Et Ti-Pou me prend le bras. 
- J'comprends pas, tu veux mon bras? Deux vigoureux serrements, et il grimace.
- Recommence, Ti-Pou.
Il reprit mon bras, doucement.
- Ah, je sais.  Tu voudrais que je te prenne dans mes bras? Un énorme serrement. Ok.
Le coeur gros comme le Chutes du Niagara, je l'ai pris, avec ses tubes, ses poteaux, ses machines, avec l'aide de sa mère.  Et nous nous sommes installés dans la chaise berceuse. 
- T'es-tu bien, monTi-Pou, demanda sa mère. Ti-Pou fit signe que oui avec sa tête.
- Et, emmitoufflé de couvertures, nous nous sommes bercés avec la berceuse, pendant un bon deux heures, sans rien dire.  Il passait son temps à me flatter le visage, en baragouinnant des 'hhe t'aime, hhe t'aime'. Que d'amour, dans ce petit être frêle.  À ce jour, je peux entendre cette petite voix d'ange-là au-dedans de moi, encore. 
Je lui avais demandé s'il comprenait ce qu'il se passait, il avait dit oui.   Ensuite il a baragouinné, 'hhe vas voir mon sien'.  Son chien Baptisé Schrek avait rendu l'âme après 11 ans de bons et loyaux services. Des photos de ce chien étaient tapissées partout avec son nom en-dessous, difficile de le manquer.  Ti-Pou avait bien hâte de retrouver son ami plein de poils. Et moi, je me disais que j'étais privilégiée en titi de connaître ce petit garçon-là. 
Deux semaines plus tard, je reçus à la maison une enveloppe brune avec la mention 'ne pas plier', d'une adresse que je ne connaissais pas.
À l'intérieur, deux photos: une de Ti-Pou et moi, prise lors de notre première rencontre, et l'autre, prise lors de notre dernière rencontre, pendant qu'on se berçait.  Je me suis effondrée en larmes.
Aussi, une lettre de sa mère, qui me remerciait de me deux visites.  Elle me racontait aussi que deux jours plus tard, Ti-Pou se sentit soudain regaillardi, en pleine forme.  Il se mit à rire, regarder la télé, taquiner son grand frère, et jouer à des jeux vidéos.  Pendant ce répit, aussi, il dessina beaucoup, parait-il qu'il adorait ça. Et, dans l'enveloppe, un dessin m'était destiné, 'À Claire je t'aime de Tipou.' Sur le dessin, un petit garçon avec des membres en allumette lançait un beau ballon multicolore à une espèce de motte de poils orange qui sautait pour l'attraper.  Un gros soleil trônait, avec zéro nuages, et un semblant de maison dans un arbre avec un drapeau de pirate bien en vue. Des fleurs, aussi, beaucoup de fleurs.
En tous cas, Ti-Pou, si c'Est comme ça, l'éternité, j'ai bien hâte de t'y retrouver.
C'est un peu comme ça que je m'imagine la suite des choses.
Un méga-party où on se retrouve tous et toutes, avec ou sans corps, je ne sais pas.  Peut-être qu'on fait juste se reconnaître entre âmes... et prendre toute l'éternité pour juste être ensemble, mais on fait rien de spécial.  On est juste bien.

samedi 14 janvier 2012

Faire dodo.

Lundi soir. 
Je ne dors pas.

Ma seule et unique motivation, cette journée-là, était de tout faire, pour que tout soit fini, pour que je puisse ultimement m'écraser dans mon lit et roupiller profondément.  Une fois arrivée, j'avais beau chercher mon roupillon, il était introuvable, jouant à cache-cache avec les racoins de mon esprit, libres de toute inquiétude, comme mes petites ballerines à 4 pattes qui m'accueillent toujours avec un ronronnement si réconfortant.

Les flocons qui tombent comme du sucre en poudre sont très invitants.  Mon esprit sucré décide de se rhabiller, et d'aller marcher. 

L'air était crystallin, pûr. Oui, je demeure à Montréal, mais pas au centre-ville.  Un plafond lumineux de milliards d'univers m'accompagnait.  Faut dire que j'ai la chance de demeurer dans un quartier bordé de parcs, et d'une tranquillité à faire rougir n'importe quel banlieusard du 450, du 418, du 819 ou du 911:).

En marchant, il me vient l'idée d'aller me quérir un breuvage chaud.  J'ai toujours aimé cette sensation, l'hiver, de tenir un breuvage chaud dans mes mains, de le hûmer, de le boire, sentir en moi cette dichotomie de différences de température, et l'été, en compagnie d'un breuvage glacial.  Chaud et froid, toujours. Une preuve?  Petite, j'allais patiner à n'en plus sentir mes pieds, mon visage et mes mains.  Je revenais péniblement à la maison, avec un gros sourire encadré de joues presque blanches de froid, et ma mère allumait le four (oui), et je m'y installais en face, dégelant tranquillement, devant cette télé au fond noir avec des trucs de plus en plus rouges, avec nulle autre impression que celle de fondre, de craquer de partout, et de laisser partir le froid tranquillement, pour m'abandonner au chaud, complètement.  Honnêtement, il m'est déjà arriver d'y somnoler.  Après quoi, eh oui, au grand admn de ma mère je me servais un grand bol de crème glacée, et allais le manger en compagnie du Capitaine Bonhomme, Bobinette, Mademoiselle Sainte-Bénite, Fanfan, ou Sol et Gobelet.

J'aime les contrastes, les différences.  En fait, j'aime réunir ce que l'univers éloigne. En fait, j'aurais dû être conseillère matrimoniale ou intervenante en milieu familial. Plus encore, j'aurais dû organiser les conférences de Kyoto.

On a une image sensorielle du Tim Horton's:  On sent le café, le sucre des beignes, la pâte des beignes, sur fond de petite musique d'ascenseur, ou de radio relaxe.  À ces quelques éléments réconfortants, on ajoute l'odeur des oeufs et du bacon pour ceux qui s'y présentent avant 12h00pm. Eh bien, ce n'est plus le cas.  Des musiques de pus en plus chick-a-boum s'y font entendre. 
Traumatisme énorme.  Moi qui croyais avoir un petit moment de réconfort, j'entre dans ce Tim's et la musique excessivement forte (les gars qui travaillent sur la route et s'arrêtent pour prendre un café sont eux-même surpris, et se crient après alors que la discussion est très intime entre eux), et il faut hurler notre commande pour être servis, ou être entendus.

Une fois le ''Un chocolat chaud s'il vous plaît'' crié à la caissière, qui semblait tout droit sortie d'un sketch de RBO, au moment où mes oreilles décident entre d'habituer aux décibels ou quitter (ah ces oreilles de crisse), je me mets à écouter malgré moi les paroles profondes de ces chansons.  J'aurai eu le courage d'en écouter trois.

La première évoque en répétition au refrain ''I fuck better than you'', la deuxième ''this fucking shit I lick it I like it'', et la troisième évouait une partie de l'orifice qui normalement ne fait pas office de refrain. À tue-tête, je vous dis.  Il y avait un mélange dans l'air, à travers l'odeur du café, des beignes et de la soupe, un mélange de ''de quessé'', et j'avais peine à croire que ceci n'était pas un coup monté.  Madame FIliatrualt elle-même aurait regardé la scène en déclarant que c'est trop gros, pas assez vrai, qu'on en met trop.  Madame Filiatrault, welcome to Tim Horton's by night.

:0)

Mercredi, journée un peu difficle au travail (qui est autre que mon métier d'actrice - ben quoi, on peut vouloir apprêter autre chose que le macaroni au fromage du Dollorama et de payer une vraie épicerie, de temps à autre. On appelle ça rêver en grand.  Send it out there, mon agent dit.  R'garde, ça fait un boutte que j'envoie ça à l'univers, mais à foirce de lancer, j'ai une épychondilyte, bon.  Astheure, je lance plus rien,  je choisis plutôt de me tenir en position prête à attraper).

J'avais commencé mon quart de travail depuis environ une heure, et n'arrêtais pas de tomber sur mon écran d'ordinateur, tête première.  Une condition médicale qu'on appelle la narcolepsie.  Pas toujours évidente à contrôler,  il n'y a aucun moyen de prévoir quoi que ce soit.  Comme si l'esprit, la matière réfléchissante de notre pensée ferme brusquement boutique pour se plonger dans un état de sommeil profond, jusqu'à ce que quelqu'un te touche l'épaule, le bras, et te sorte de ta torpeur.  Comme si on m'envellopait soudainement avec une couverture noire.  Comme si j'avais fait un double de mes clés à Mesmer et qu'il venait s'installer dans un coin de ma tête avec sa barbichette et ses yeux.

À part la honte initiale de ne pas avoir été aussi productive que d'habitude, il me fallait maintenant affronter le grand froid (-15 C, ressenti -23 C, je le sais grâce à mon téléphone intelligent), et entrer à la maison. 

Normalement, on parle d'environ 45 minutes, et me voilà accueillie par deux chattes jumelles qui me ronronnent une symphonie dont je ne me taris jamais.  Mais ce soir-là, devrais-je dire cette nuit-là, je suis entrée à 3h30am.

Pour ceux et celles qu inous lisent et ne connaissent pas les métros de Montréal, ils sont gérés par des lignes de stations de métro désservant la métropole.  Normalement, je prends la ligne Verte, direction Angrignon, pour une balade d'envion 25 minutes, le temps de lire un journal gratuit.  Mais ce soir-là, j'ai eu d'autres épisodes de narcolepsie, cette fois-ci en mitraillette.  Donc, un trajet pourtant bien simple devint disons-le poliment une occasion de découvrir Montréal la nuit au grand froid.

Au lieu d'arrêter à ma station, je me rendis jusqu'au bout de la ligne Honoré-Beaugrand.  Un contrôlleur de métro me réveilla.  Je retournai dans le métro, lui assurant que j'allais pouvoir sortir à la station voulue, et j'en étais absolument convaincue. Je repris la ligne Verte, cette fois direction Angrignon, je n'avais que 3 stations à faire, me disais-je. 

Et je me suis réveillée, complètement à l'autre bout, au métro Angrignon...

Retourne de l'autre côté, me tenant réveillée avec n'importe quoi, chanter, taper du pied, compter le nombre de gars qui insistent pour nous montrer leur fond de culotte, name it.  Mais je sentais l'endormitoir proche, donc quand j'aperçus la Station Lionel-Groulx, je décidai de sortir, et me rendre chez-moi avec la ligne Orange.  Parcours un peu plus long et différent, mais au moins je serais éveillée.

Eh bien non.  Je me rendis jusqu'à dépassé Henri-Bourrassa, Cartier, Montmorency... et me réveillai avec Michèle Deslauriers qui me disait ''Merci d'avoir voyagé avec la STM. Bonne soirée''.  Et hop, en route pour Côte Vertu, pour aller rattraper une autre station, toujours sur la ligne Orange.  Et m'endormis profondément jusqu'à l'autre bout de la ligne, métro Côte-Vertu!

Je sortai pour me rendre de l'autre côté, histoire encore une fois de rattraper le fameux métro.  Eh bien non, mesdames et messieurs.  Le dernier métro avait passé, et je ne pouvais plus prendre le métro.  Me voilà à l'autre bout de l'Ile, sans transport autre que l'espoir de trouver une solution pour une partie du trajet. 

Et que je vous y prenne. Ne pas déranger un employé de la STM qui a assez de cran pour y travailler de nuit, promis?

Pas de taxis à l'extérieur, dans cette partie de la ville où je ne viens jamais.

Mais... quoi faire?  Je n'avais aucunement les moyens de traverser notre métropole d'amour avec mes quelques deniers restants, cachés dans le coffre. Ça m'aurait sûrement coûté presqu'une semaine de travail.

Après consultation auprès de 4 chauffeurs d'autobus qui visiblement ont troqué la confirmation pour la confusion, j'ai finalement reçu du chauffeur de l'autobus 368 la bénédiction tant attendue.  J'allais partir de Ville Saint-Laurent et traverser Montréal pour me rendre jusqu'au métro Frontenac.  Un voyage d'environ 50 minutes, avec les sillons obligatoires.

Je lui ai demandé derechef de me réveiller, si j'avais la malencontreuse idée de m'endormir. Non, mais j'avais attendu cet autobus 27 minutes au grand froid et sans abri, me retrouver au chaud et assise, à 1h40 du matin, dans le ronron de l'autobus, pouvait comporter pour n'importe quel individu, narcolepsie ou pas, un danger potentiel de réconfort avoisinant une bonne sieste.

2h12am.  On nous laisse devant la station fermée Métro Frontenac, l'équivalent d'être devant la vitrine de Noel de Ogilvy's, sans pouvoir embarquer dans leur petit train et jouer avec les jouets, ou jouer avec les personnages. 

Je sors du bus, la bouche pâteuse, le regard hagard, et le -28 ressenti, ressenti en titi. Vite, un taxi, queq'part, un 20$ qui serait un bon investissement.  Mais ils jouent à cache-cache avec moi, ou à passer devant moi avec leur espoir de petit truc sur le toit allumé, pour me dire qu'ils sont 'pris'... ou virer folle, which ever comes first.

J'essaie d'appeller, on me dit qu'il y en a déjà dans le secteur, au 'stand de taxis'.  Rien de plus faux.

Le stand est vide, et ma tête aussi!  Pas capable d'appeller, mon cellulaire est frigorifié, les téléphones publics aussi.

Je regarde les arrêts d'autobus.  Le froid, et ma vision déjà un peu hypothéquée par la fatigue et le froid ne m'aident pas à lire clairement quel autobus je dois prendre pour finalement me laisser choir à l'horizontale.

Un autobus.  Je monte et demande les renseignements.  ''Allez à l'aut' boutte, c'est la 358 qu'y faut prendre.''

Après un bon 15 minutes à chercher, je trouve l'arrêt d'autobus frigorifié et attends le Messie # 358, en compagnie d'un homme que je crois bien reconnaître de l'équipe des figurants de la Planète des Singes, qui m'explique avec une précision d'horloger que ce bus arrive à 2h29am, et que je suis mathématiquement chanceuse de pouvoir être aussi 'on'. Pourtant, je ne m'étais jamais sentie aussi 'off'.
Le monsieur pré-cambrien me demande l'heure constamment.  Il ne comprend pas ma montre lui ''dire que 2h29 n'est passé être plus tard que 29 am'', Avant de prendre siège dans le 358, je re-demandais s'il s'agissait du bus longeant la rue Sherbrooke.  ''Ben non, madame c'est la 364, pis a vient de juste de partir, vous l'avez pas vue?'' Euhh... si j'avais su que c'était le bon autobus, j'aurais porté beaucoup plus attention, disons!
Bref... Attends la 364.  Jusqu'à 3h10am. 
Embarquer dans ce bus fût une expérience spirituelle, rien de moins.  Les yeux rouges un peu, je respirais cet air un peu plus clément pour mes poumons.  Et que de gratitude m'envahit.  Après avoir remercié mentalement les nombreuses personnes avec qui j'ai fait un bout de route, nous arrivons à destination, à 10 minutes à pied de chez-moi.
Je ne me peux plus!
Mes chattes non plus.  Elles ont faim, mais aussi faim d'attention, et de tendresse.  Same here.
Après un petit bol de soupe, lavé le visage et les dents, et un massage en règle de mes 'filles' (les deux en même temps!), j'ai tombé dans mon lit, pour vrai.
Jamais ce ne fut aussi doux, que de se glisser sous la couverture.  Jamais ce ne fût aussi réconfortant, cette petite soupe.  Et Régler le cadran pour dans une couple d'heures (eh oui, il fallait que je me lève tôt). Enlever les lunettes.  Fermer la lampe.  Entendre les filles sauter par-dessus les couvertures et prendre leur place, Esther derrière mes genoux pliés, Ruth au bout du lit, contre mes pieds. Entendre leur ronron m'amener à enfin dormir. 
Ça tient à quoi, le bonheur, dans le fond?
Être remplie à ras-bord de gratitude pour cette journée qui se termine, et finalement, faire dodo.

samedi 7 janvier 2012

Le syeux humides.

Vieillir comporte certains plaisirs.

Tiens, par exemple, on peut être marginal sans faire trop d'efforts.

Je n'éprouve plus le besoin de cacher ma tignasse de plus en plus grisonnante.  Parce que, à mon âge, les sourcils aussi deviennent gris, ensuite blancs.  Rien de plus laid qu'une teinture sur le cuir chevelu sertie de sourcils gris-blancs, ou assortis de sourcils tracés au crayon.  C'est à mourir de rire sur certains individus.  Alors, autant avoir l'air de mon âge, et que tout soit conforme, et comme il doit être.  Fait intéressant, en posant ce geste, je vis dangereusement, en marge de la société, celle-là même qui nous dicte de cacher tout signe de vieillesse, sous peine de ne pas pouvoir intégrer ladite société.

On peut vivre comme si c'était le dernier jour de notre vie, parce que quand le '50' arrive, même si nul d'entre nous ne connaissons le jour ou l'heure du grand départ, la fin de vie se fait un peu plus sentir.  Les amis autour de nous s'éteignent  tous, les uns après les autres. Quand la plupart de tes connaissances sont en-allées, que les êtres les plus significatifs de ton existence commencent à disparaître un à un, on se dit que ça doit faire la fête de l'autre côté.  Celà ne veut pas dire pour autant qu'on veut aller les rejoindre derechef, mais c'est une première façon d'arrêter d'avoir peur de mourir.

D'entrée de jeu, avoir 50 ans implique mathématiquement que nous avons au moins complété plus que la moitié de notre existence. Le pire est fait:  L'école, la passage à la vie adulte, l'apparition des premiers signes de vieillesse,  la recherche du compagnon idéal... je sais maintenant qu'il n'existe pas, et qu'il me reste encore un peu de patience pour continuer à croire que je pourrai terminer mes jours autrement que seule, avec un homme relativement aussi courageux que moi.

C'est le seul temps de l'existence où on peut rendre les gens mal à l'aise et être pardonnés sur-le-champ. Vous pétez devant parents et amis pendant votre jeunesse?  On va vous le remémorer sans cesse.  Une personne plus âgée le fait, on roule les yeux, et on change de place.  Je serais bien mal jugée si je me mettais à rire des pets de nos aînés.  On leur doit le respect sine qua non, parce qu'en partant, ils ont le mérite de s'être rendus jusqu'au moment où on se parle, et d'en savoir plus que nous sur bien des sujets.

Il n'est pas mal vu, non plus, de ne pas aimer quelqu'un ou quelque chose, quand on a un certain âge.  Un bon 'J'aime pas ça' bien placé arrête toute discussion.

Faire semblant qu'on est un peu dûr de la feuile est une option absoument géniale, pour éviter les sujets qui vous horripilent, ou qui vous ennuient.

Le besoin d'acheter des trucs se fait moins sentir.  On se fout des garanties quand arrive le temps d'un achat plus sérieux au niveau de la facture, à quoi bon?

Par contre, plus le cadran de l'âge avance, plus il y a un laisser-aller, parfois et malheureusement dans bien des sphères de la vie, justement parce que le 'à quoi bon' est un peu plus fort que tout le reste. 

De par mon experience personnelle et mes observations, l'expression 'à quoi bon' est un excellent baromètre-indicateur du degré d'amour existant chez ceux qui l'utilisent.  Je dis ça,en passant.

Mais bon,. dans un exercice d'honnêteté, le pire, c'est la solitude de la nostalgie.  De ce qu'il y avait avant, et de ceux qui y étaient.  Elle provoque malgré elle un isolement.  La prochaine fois que vous me verrez les yeux pleins d'eau sans raison, ce n'est pas une allergie saisonnière. 

Très drôle, comment le cours normal de la vie va tellement plus rapidement, quand on atteint la plus-que-moitié de notre existence.  Une vraie Formule 1.  Et comme on ne veut plus vivre à 100 à l'heure, c'est parfois étourdissant. 

Mais j'aime vieillir.  J'ai l'impression de tout redévouvrir une deuxième ou troisième fois, à travers les yeux des jeunes que je croise.  Vous êtes beaux, et je vous souhaite de bien vieillir, vous aussi...avec les yeux humides.

jeudi 5 janvier 2012

Ça m'apprendra.

Ouille. 

Je viens de bosser sur un texte pour, disons-le, vous impressionner, truffé de calembours, de style, et d'humour. 

Et trois heures et 3/4 plus tard, après avoir tout relu, et débarassé mon chef-d'oeuvre que sont les fautes d'orthographe, de syntaxe, de grammaire, je pèse sur LE mauvais bouton.

Et hop.

Les centaines de mots, partis, dans les méandres inter-internetiennes.

Ça m'apprendra.